A.J. a vécu plusieurs vies. Lorsque cela devient trop compliqué ou que la pilule devient trop grosse pour être avalée, elle se barre pour mieux recommencé. Une autre ville. Une autre histoire. Un autre mensonge. × A.J. est une grande dramaturge qui vit dans la théâtralité. Faute d'avoir pu devenir réalisatrice, elle créé ses propres films dont elle est l'actrice principale; × A.J. est une succession de rêve avorté. Elle se lasse et s'enlace. Elle se perd et s'abandonne. Elle vit dans la démesure. × A.J. est une ringarde vintage qui s'ignore. × A.J. est une éternelle insatisfaite. Elle cherche à combler un vide. Cette pauvre conne n'a rien compris, elle ne sait même pas ce après quoi elle court, mais une chose est certaine : elle court. × A.J. nourrit une addiction particulière pour le Dr Pepper. × A.J. suit un régime déséquilibré des plus strictes. Hamburger. Fajitas. Soda. Alcool. Frite. Beignet. Chips. C'est à se demander comment elle arrive encore à entrer dans une taille 36. Bon d'accord, un petit 38. × A.J. n'a pas de style de musique. D'ailleurs, elle n'a AUCUNE culture musicale. × A.J. aime ses cheveux. Beaucoup trop. × A.J. est instable, changeante et lunatique. Elle est relativement difficile à cerner. Elle se mélange dans toutes ces vies. × A.J. traîne son chat à travers ses vies tumultueuses. Il demeure son point d'ancrage, sa seule attache.

Tu t'extraits de l'épave qui te sert de voiture, claquant la portière d'un vulgaire coup de talon. Tu enfonces tes mains dans les poches de ton blazer en cuire. Ce n'est qu'une escale vers ta nouvelle vie. Tu n'es encore qu'une carcasse vide sans histoire. Ton regard noisette se glisse sur les lieux et les personnes, prête à voler le moindre détail de leur misérable vie pour te réinventer. Tu t'enfonces dans les mensonges. Tu t'es éloigné de la réalité depuis trop longtemps. La frontière est confuse. Tu ne sais plus qui tu es réellement. Tu es ce que tu veux, ce que tu décides, ce que tu n'es pas. Tu pousses la porte de la station service et te frayes un chemin tout droit vers l'un des frigo. T'en extirpe une canette de bière. Ton regard se pose sur un couple. Roucoulant et dégoulinant d'amour. La fille porte un diadème de gamine, décoré d'un voile grotesque. Son doigt est habillé d'une bague dont le diamant est taillé dans un sucrerie violette. Elle s'abandonne si facilement dans les bras de son prince, qui tient un bouquet de fleur cueillie à la ramasse dans le jardin de sa grand mère. C'est mièvre. C'est romantique. C'est ce que tu vas leur volé. Cette bride d'histoire va devenir ton histoire. Tu vas te l'approprier. Tu vas te créer cette amour langoureux, passionné et violent. Oui, cette amour qui 'ta rongé jusqu'à ce que la mort vienne t'arracher ce mari trop turbulent. C'est que du vent, mais tu t'en balances, les gens avalent n'importe quoi, ils te couvrent d'une pitié bien trop facile. Tu n'éprouvent aucune culpabilité. C'est pas de ta faute à toi, si ce ne sont que des naïfs prêts à gober toutes les conneries d'une donzelle au regard de biche. Pourquoi mentirait-elle? Pourquoi mentirais-tu?Avec de grands yeux tristes et une histoire à t'en arracher le cœur. Peut-être même que dans ton malheur, cet enfoiré t'a arraché la seule chose qui t'a jamais compté. Votre fille. Tu te traînes jusqu'au comptoir. T'y dépose la boisson. Tu pointe du doigt une bague de pacotille qui trône sur le comptoir. Le genre babiole que les petites filles gagnent dans les machines à pièce. Tu n'a pas remarqué ce type qui te zieute curieusement. Tu ne sais pas que cela fait un petit temps qu'il te colle au train. Tu ne sais pas qu'il s'apprête à briser ton petit manège. A moins qu'il puisse être ton meilleur allié. Pour le moment, ce n'est qu'un inconnu. Un loubard sur lequel tu ne penses pas t'attarder. T'es que de passage ici. Tu es en route vers ta nouvelle vie. Tu es bien trop occupé à construire cette vie de rechange. Tu déposes quelques billets sur le comptoir et tu te barres sans attendre la monnaie. Tu t'arrêtes, juste le temps d’attraper une brochure. Adélaïde. Pourquoi pas... Tu remontes dans ta bagnole pourrie. Ce sourire séraphin figée sur tes lippes rosées. La trame est bateau, simple et attendue. C'est le charme de ce mensonge. Presque trop simple. Presque trop facile. Plus c'est gros, plus les gens en redemande. Tu te régales d'avance. Tu ouvres la canette, laissant la bière couler délicieusement dans ton gosier. Si tu avais pris la peine de regarder dans ton rétro viseur, tu aurais vu que ce sale type est toujours sur tes traces. Si tu n'étais pas si obnubiler par ta petite personne, tu aurais peut-être compris que ce mensonge serait le mensonge de trop. Mais t'es trop fière. Trop sûre de toi. La bonne nouvelle, c'est que tu tombera pas plus haut que ta paire d'escarpin.